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35e Suppl. à la RACF, 2009, AFEAF 32 Les Gaulois sont dans la ville
Stéphane Carrara*
avec la collaboration de Guillaume Maza**
et Stéphane Rottier*
L’agglomération urbaine de
Lyon-Vaise (Rhône) à la fin du
VI e s. et au V e s. av. J.-C. :
bilan des découvertes
THE URBAN AGGLOMERATION AT LYON-VAISE
( R H Ô N E ) AT T H E E N D O F T H E S I X T H
AND IN THE FIFTH CENTURIES BC
Mots-clés :
Hallstatt D3, La Tène A, Lyon-Vaise, Agglomération urbaine, Habitat, Mobilier d’importation, Artisanat, Métallurgie, Travail de la corne, Textile, Organisation urbaine.
Keywords :
Hallstatt D3, La Tène A, Lyon-Vaise, Urban settlement, Imports, Craft-working, Metallurgy, Horn working,
Textiles, Urban organization.
Résumé :
Depuis 1984-1985 et les premières découvertes de vestiges datés du premier âge du Fer sur le chantier
archéologique du Métro Gorge de Loup, le développement de l’archéologie de sauvetage ou préventive a
permis de mettre au jour à Lyon-Vaise une trentaine de sites concernant la période du Ha D2-D3 et le
début de La Tène A. Ils se répartissent sur environ 150 hectares dans la plaine alluviale. L’occupation de
Lyon-Vaise apparaît comme un habitat ouvert et étendu, où les vestiges semblent se concentrer sur une
cinquantaine à une soixantaine d’hectares dans la partie sud de la plaine. Elle est caractérisée par de
nombreuses céramiques d’importation méditerranéenne liées au service du vin, qui attestent une consommation locale. Les structures archéologiques et le mobilier font apparaître des activités agro-pastorales et
des artisanats spécialisés particulièrement bien représentés, notamment les métallurgies du fer et des alliages cuivreux, le travail de la corne et du textile.
Abstract :
Since 1984-85, when the initial discoveries of First Iron Age finds were made in Lyon-Vaise in archaeological excavations at the Gorge de Loup metro station, the development of rescue archaeology has
allowed the identification of about thirty sites relevant to the Hallstatt D2-D3, La Tène A1 period. They
are distributed over about 150 ha on the alluvial plain of the Vaise. The occupation at Lyon-Vaise seems
to be an extensive unenclosed settlement, with the densest concentration of structures in the southern part
of the plain. The occupation is marked by the import of pottery from the Mediterranean linked to trade
in, and the service of, wine, betokening local consumption. Both structures and finds provide evidence for
agriculture and stock-raising with specialized craft-working especially well represented. The latter
include in particular iron and copper-alloy metallurgy, horn-working and the making of textiles.
* Service Archéologique de la Ville de Lyon, doctorant de l’Université-Lyon 2.
** Archéologue, Archeodunum SA, Antenne Rhône-Alpes, 500 rue Juliette Récamier, 69970 Chaponnay.
*** UMR 5199 PACEA, LAPP, Université Bordeaux 1.
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À la suite des débats qu’a suscités le colloque, nous
avons modifié le titre de notre communication qui
s’intitule désormais « L’agglomération urbaine de
Lyon-Vaise à la fin du VIe s. et au Ve s. av. J.-C. : bilan
des découvertes ». Nous assumons donc le classement
de l’occupation qui s’étend dans la plaine de Vaise
(Lyon 9e arrondissement) parmi les agglomérations
urbaines. Certes, nous verrons que les données
manquent encore, ou que les densités de vestiges
peuvent paraître faibles au premier abord, sans le
recul nécessaire qu’imposent 2500 ans d’occupation
humaine sur le même espace. Encore faut-il préciser
que la carte des vestiges protohistoriques est entrecoupée de perturbations naturelles et anthropiques
particulièrement destructrices. Il n’en demeure pas
moins que l’analyse fine des découvertes lyonnaises
permet d’observer le développement de certains caractères qui définissent le fait urbain : concentration
d’activités spécialisées, récurrence de certaines orientations, cloisonnement de l’espace, qui nous ont conduits
à retenir l’appellation d’agglomération urbaine.
En 1984-1985, la fouille de sauvetage menée sur le
chantier du Métro Gorge de Loup a permis, pour la
première fois à Lyon-Vaise, la mise au jour d’une
occupation du premier âge du Fer. Cette découverte
venait confirmer l’existence d’une implantation
humaine antérieure à la cité romaine, déjà avancée
depuis le XVIIe siècle sur la base de textes gréco-latins
peu fiables, falsifiés ou détournés de leur sens original,
mentionnant la création hypothétique d’une cité
fondée par des Grecs ou des Gaulois devenus grecs :
Lugudunum, ou Lougoudounon (Perrin, Bellon 1997 ;
Bellon, Perrin 2007 ; Goudineau 1989). C. Bellon et
F. Perrin ont pu définir l’occupation du Hallstatt final
comme remarquablement étendue sur le territoire de
la plaine de Vaise, puisque près de trois kilomètres
séparent les sites les plus éloignés. Ils relient son
origine au développement du commerce massaliote et
de ses comptoirs bas-rhodaniens. Il pourrait s’agir du
principal lieu de transbordement de marchandises en
provenance du sud, sur l’axe Rhône-Saône. Les
découvertes anciennes du plateau de Loyasse et de la
rue de Trion pourraient indiquer une occupation de
hauteur de la même période, mais également d’une
phase plus ancienne, datée de la fin du VIIe siècle et du
début du VIe siècle, rapprochant ainsi le site de Lyon
du modèle « princier » : un site de hauteur (une
acropole) avec ses faubourgs (implantés en contrebas
dans la plaine), liés à la présence d’un cours d’eau
d’importance, et qui concentrent de nombreux
produits d’importation, notamment méditerranéens
(Perrin, Bellon 1997).
La masse de matériel céramique associé au
mobilier métallique datant (notamment la parure) et
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aux quelques datations dendrochronologiques
obtenues sur les bois des palissades découvertes sur le
site du Métro Gorge de Loup permettent de situer
l’essentiel de cette occupation entre le dernier tiers du
VIe et le milieu Ve siècle av. J.-C., voire jusqu’à la fin
du Ve (fibule du type de La Certosa : 450-300 ; coupe
à figure rouge : 430-425). Quelques sépultures, du Ha
C2/Ha D1-2 (730-650 et 650-520 av. J.-C.), attestent
également la fréquentation de la plaine de Vaise à
une phase plus ancienne du premier âge du Fer
(Bellon 2003 b).
1. CADRE GÉOGRAPHIQUE DE L’OCCUPATION ET
ACCÈS AUX VESTIGES
Aujourd’hui, avec la multiplication des interventions d’archéologie préventive, près d’une trentaine1
de sites (Fig. 1 et 3) concernant la période du Ha D2D3 et le début du second âge du Fer (La Tène A) ont
été répertoriés à Lyon. Ils se répartissent sur environ
150 ha (Fig. 2) principalement dans la plaine alluviale
de Vaise qui s’étend sur la rive droite de la Saône et au
pied de plateaux la dominant d’une centaine de
mètres : les plateaux de Loyasse, de la Sarra et de
Saint-Just au sud et sud-est, et le plateau de La
Duchère au nord-ouest. Cette plaine correspond au
neuvième arrondissement de Lyon, un quartier densément urbanisé depuis l’entre-deux-guerres. Son
altitude NGF est comprise entre 167 m et 173 m dans
la partie centrale de la plaine et atteint 176 m à 192 m
NGF au pied des versants. Seulement 12 ha ont été
fouillés ou sondés sur les 270 ha que compte la plaine
alluviale de Vaise. L’emprise au sol des niveaux du
premier âge du Fer concerne une surface cumulée de
plus de 3,7 ha2. La profondeur des vestiges par
rapport au niveau du sol actuel est irrégulière, de
moins d’un mètre à trois ou quatre mètres, et au delà
dans certains cas particuliers (fond de talweg).
L’occupation du Ha D2-3 et de LT A1 se caractérise donc par son étendue, et présente une hétérogénéité manifeste dans la densité, la conservation et la
répartition de ses vestiges.
Si la densité des structures présentes à Lyon-Vaise
peut paraître faible au premier abord, il faut la relativiser au vu des nombreuses perturbations que le site a
subies. Les constructions contemporaines ont entraîné
la destruction d’une part importante des niveaux
1. Nous avons tenté de dresser un bilan, le plus exhaustif possible, de
l’occupation de la fin du premier âge du Fer à Lyon-Vaise au moyen
d’un tableau récapitulatif prenant en compte les sites (opérations de
fouilles et diagnostics) ayant permis la mise au jour de vestiges ou
simplement de traces de fréquentation.
2. Cette surface correspond aux emprises des fouilles positives pour la
présence de vestiges du premier âge du Fer. Ce chiffre est surévalué
par rapport à la surface effective des niveaux atteints et dégagés,
concernant cette période.
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Fig. 1 : Localisation des sites du VIe et Ve siècle av. J.-C. à Lyon
(fond de carte : Service archéologique de la Ville de Lyon, Juillet 2008).
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Fig. 2 : Localisation des sites du premier âge du Fer à Lyon-Vaise, fouilles et diagnostics pour le premier âge du Fer
(fond de carte : ALyAS, Service archéologique de la Ville de Lyon, Janvier 2008).
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Fig. 3 : Récapitulatif des sites occupés à la fin du premier âge du Fer et au début du second à Lyon-Vaise.
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Fig. 4 : Les vestiges du premier âge du Fer du 65 rue du Souvenir
(dessin d'après la base ALyAS du Service archéologique de la Ville de Lyon et d'après Plassot 1992).
protohistoriques. De même, les divagations de paléochenaux dans la plaine, notamment entre les IVe et
Xe siècles apr. J.-C., ont largement entaillé le terrain
et entraîné la disparition totale ou partielle de
nombreux aménagements protohistoriques. Il faut
également insister sur le fait que les occupations
postérieures, gallo-romaines ou médiévales, ont érodé
et recoupé les traces d’occupations plus anciennes en
se réinstallant directement à leur surface. De même,
certains vestiges, hors cote de fond de fouille, ne sont
que partiellement dégagés lors des opérations
d’archéologie préventive et l’on peut supposer qu’une
partie d’entre eux n’a pu être atteinte. Enfin, divers
aménagements repérés lors de sondages d’évaluation
archéologique n’ont pas été suivis de fouilles préventives et restent donc mal documentés.
L’hétérogénéité dans la conservation des vestiges
résulte des mêmes phénomènes évoqués précédemment, qui, lorsqu’ils ne les ont pas totalement détruits,
les ont largement érodés et endommagés. Ainsi, il est
par exemple difficile d’observer le niveau d’ouverture
d’origine des structures excavées ou d’identifier des
niveaux de sol associés lorsque leur surface n’a pas
reçu un aménagement spécifique (empierrement).
2. BILAN DES DÉCOUVERTES
2.1. Les types de vestiges mis au jour à Lyon-Vaise
Sur les 150 ha évoqués, une zone restreinte abrite
l’essentiel des sites dans la partie méridionale de la
plaine, au débouché du vallon de Trion. Cet espace
couvre plus d’une cinquantaine d’hectares entre les
gisements du 10 rue Marietton, du 65 rue du
Souvenir, du 81-83 rue Gorge de Loup et du Métro
Gorge de Loup (Fig. 2). Il faut évoquer, parmi les plus
importants, ceux de la rue du Docteur Horand, du
Métro Gorge de Loup, de la rue Sergent Michel
Berthet, de la rue Marietton et de la rue des Tuileries.
Les vestiges d’occupation restent partiellement
reconnus et correspondent à plus de 370 faits archéo-
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logiques identifiés (principalement des structures en
creux), qui représentent une surface effective de
1000 m2. Une partie des aménagements possède une
vocation domestique, ou agro-pastorale. Ils se rapportent à des habitats en bois et en terre (trous de poteau
et de piquet, négatifs de sablières, foyers domestiques,
fosses dépotoirs, fonds de cabanes ou cave/cellier), un
grenier et des espaces de stockage (sablières, niveaux
de sol, silos) et des parcs à animaux (enclos, palissades). Une part non négligeable de ces vestiges, sans
doute plus importante qu’on ne l’a évoqué jusqu’ici3,
semble attachée à des activités artisanales (fossesateliers, foyers de forges, dépotoirs, niveaux de sol).
Enfin, un espace funéraire plus ancien que le reste de
l’occupation (Ha C2/Ha D1-2) comporte six inhumations (fouille du Métro Gorge de Loup).
2.1.1. Les constructions au sol ou surélevées
Il demeure difficile de restituer un plan d’habitat ou
de bâtiment à Lyon-Vaise, malgré la présence de
nombreux trous de poteau ou de piquet, et de
quelques négatifs de sablière, du fait de la disparition
d’une partie de ces structures. Prenons l’exemple des
trous de poteau et des calages : la faible profondeur de
certains d’entre eux (quelques centimètres) et la
présence de calages comportant des blocs de trop
faible dimension pour assurer, à eux seuls, le maintien
d’une superstructure sans un trou de fondation suffisamment profond, témoignent de l’érosion qu’ont
subie ces aménagements. Néanmoins, on peut supposer l’existence d’un bâti à deux ou trois nefs, ou d’une
palissade avec différents appentis attenants, sur le site
du 65 rue du Souvenir (Plassot, Thevenin 1992) sans
pouvoir en établir le plan exact (Fig. 4). De même sur
le site de Horand I (Bellon, Perrin 1992), les
nombreux calages et trous de poteau (39 exemplaires)
ne permettent d’établir que quelques orientations. Sur
le site du 10 rue Marietton (Ayala, Monin 1996), une
série de trous de poteau et un négatif de sablière
appartiennent à un bâtiment dont le plan et la nature
nous échappent (Fig. 5). Ces aménagements permettent néanmoins de confirmer la présence de constructions au sol, sur poteaux porteurs ou sur sablières
basses, dont les parois sont en torchis appliqué sur du
clayonnage4. L’existence de constructions surélevées,
sur cadre de poutre, est attestée par le grenier du site
3. En effet, à la lumière des travaux récents concernant cette période,
et des données nouvelles disponibles pour Lyon, un réexamen des
structures mises au jour, d’après leur morphologie, leur dimension et
le mobilier leur étant associé, permet de présumer de l’existence
d’aménagements liés aux différentes activités artisanales présentes
sur le site de Vaise.
4. De nombreux sites lyonnais ont révélé la présence de torchis, parfois
associé à des traces de clayonnage, dans les comblements de fosses,
notamment sur les sites des Tuileries I et II, au 10 rue Marietton, sur
le site du Métro Gorge de Loup ou de Horand I-IV.
Fig. 5 : Les vestiges du 10 rue Marietton et détail du fond de
cabane ou d'atelier (?)
(dessin d'après Monin 1995, SAVL).
du Métro Gorge de Loup où une série de gros galets
supporte probablement un plancher (Burnouf
et al. 1989). Les indices les plus flagrants de ces
habitats sont constitués par de nombreuses fosses
dépotoirs contenant un abondant mobilier domestique et d’importants rejets d’ossements liés à la
consommation carnée.
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2.1.2. Les foyers
Une trentaine de foyers domestiques répartis sur les
fouilles lyonnaises accompagnent les différents
habitats. Ces structures de combustion se présentent
sous la forme d’une assise de galets chauffants ou
d’une chape d’argile reposant sur un radier de galets
et de blocs de gneiss. Leur aspect est souvent quadrangulaire, avec des dimensions variant de 0,60 m par
0,70 m à 1,45 m par 0,95 m5. Certains d’entre eux
permettent d’identifier des habitats associés à des
zones artisanales.
Au moins un foyer et peut être un deuxième sont
plus spécifiquement destinés au travail du fer. Le
premier est de forme circulaire et en cuvette (0,45 m
de diamètre pour une profondeur de 0,30 m). Il
conserve une partie de ses parois en argile vitrifiée et
scoriacée. Il contenait encore de nombreuses scories
parmi son comblement et une grande quantité de
battitures était présente dans la structure et autour de
celle-ci. Le deuxième foyer, rectangulaire, est de plus
grande dimension (1,20 m par 0,80 m). Il est en
grande partie détruit (ou érodé) et ne conserve qu’un
radier de sole constitué de blocs de gneiss, de granite
et de galets portant des traces importantes de rubéfaction. Cet aménagement est installé dans un creusement peu profond.
2.1.3 Les constructions excavées ou semi-enterrées
Parmi les nombreuses fosses (près de 110) mises au
jour dans la plaine de Vaise, le plus souvent identifiées
comme le résultat d’une extraction de matériaux,
certaines, de plus ou moins grandes dimensions,
présentent une morphologie particulière. Il s’agit de
fosses régulières plus ou moins quadrangulaires,
ovales ou pseudo-circulaires, possédant pour certaines un fond plat, des parois verticales, de temps à
autres une banquette et des séries de trous de piquet
ou de poteau. Elles peuvent se rapporter à des
constructions excavées ou semi-enterrées appartenant
à des structures domestiques et de stockage (fonds de
cabane6, caves ou celliers), ou à des installations
artisanales (fonds d’atelier). À Lyon-Vaise, seize
fosses répondant à ces critères de taille et de forme
pourraient se rapporter à des constructions semienterrées. Certaines d’entre-elles contiennent du mobilier
spécifique (outillage et déchets liés à divers artisanats). Elles sont présentes sur dix sites archéologiques7.
5. Métro Gorge de Loup, Horand I-IV, rue des Tuileries.
6. Il ne s’agit pas d’habitats mais plutôt de structures annexes (de petits
bâtiments) liées à un habitat, dont le matériel ne permet pas de
déterminer avec certitude la présence d’activités artisanales.
7. Horand I et II, 10 rue Marietton, 65 rue du Souvenir, 89-91 rue
Marietton, 24-34 rues Sergent Michel Berthet/Cottin prolongée, 26
avenue Joannès Masset, Métro Gorge de Loup, 22 rue Joannès
Masset et 14 rue des Tuileries.
35E SUPPL. À LA RACF, 2009, AFEAF 32 LES GAULOIS SONT DANS LA VILLE
On peut notamment citer l’exemple du 10 rue
Marietton où une grande fosse quadrangulaire de 3 m
par 2,10 m, pour une profondeur de 0,90 m, présente
une banquette associée à des trous de piquet et des
parois verticales (Fig. 5). Elle pourrait appartenir à un
fond d’atelier ou à un petit bâtiment à vocation
domestique lié à un habitat. Une fosse de forme et de
profil similaire est partiellement conservée sur le site
du Métro Gorge de Loup (Burnouf 1987). Il s’agit
d’une fosse de 2 m de large conservée sur 1,50 m de
long et de 0,45 m de profondeur ; elle présente des
parois verticales sauf sur un côté où la paroi est inclinée vers l’intérieur, au départ d’une petite banquette.
De même, rue du Souvenir, une fosse quadrangulaire
de 1,40 m par 1,70 m, profonde de 0,62 m, est parfaitement centrée dans un réseau de trous de poteau, liés
à un bâtiment. Dans ce cas, l’hypothèse d’une petite
cave ou d’un cellier paraît envisageable (Fig. 4). Des
fonds d’atelier de forme quadrangulaire sont présents
sur les sites de Berthet/Cottin, de Horand I et du 14
rue des Tuileries (Tuileries II) (Fig. 6). Leurs dimensions varient entre 2,10 m par 2 m et 3 m par 4 m pour
des profondeurs entre 0,40 m et 0,90 m. Elles sont en
relation avec divers artisanats : corne sur le site de
Horand I, alliage cuivreux à Berthet/Cottin. D’autres
structures fossoyées, de forme ovale, associées à de
nombreux trous de piquet et à un mobilier spécifique
(dévidoirs, pesons…) semblent liées au tissage et à
l’installation de métiers à tisser verticaux sur les sites
de Horand I et du 14 rue des Tuileries8. Enfin, trois
grandes fosses circulaires ou pseudo-circulaires, d’un
diamètre compris entre 2 m et 2,40 m, profondes de
0,30 à 0,50 m, sont systématiquement liées à d’importants déchets de forge : sur l’opération archéologique
de la rue du Souvenir, sur un diagnostic au 89-91 rue
Marietton et sur la fouille préventive du 24-34 rues
Sergent Michel Berthet/Cottin prolongée (Ramponi et
al. 2004, Le Mer, Chomer 2007 : 728-731). Il semble
que ce type de structure ait pu accueillir une activité
de forge (cf. infra la métallurgie du fer).
2.1.4. Les empierrements
Des sols empierrés au moyen de galets et de blocs
de gneiss sont présents sur quatre sites. Ils sont interprétés comme des sols d’habitat (à Horand II) ou des
aires de travail (au 16-28 rue des Tuileries). Outre de
nombreux éléments liés à des activités et pratiques
domestiques, ils livrent parmi le mobilier collecté à
8. À Horand I, La fosse F73, de 2,70 m par 2,10 m, profonde de
0,70 m, entourée de onze trous de piquet, contenait un dévidoir, un
peson tronc-pyramidal et deux fusaïoles (Bellon, Perrin 1992). Au 14
rue des Tuileries, la fosse F40 de 3,20 m par 2,30 m, profonde de
0,90 m, comporte treize trous de piquet dont sept alignés sur une
banquette intérieure. Son comblement contenait un lot homogène
de mobilier lié au travail du textile (fusaïole, pesons, dévidoirs et
aiguilles) (Maza 2009).
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Fig. 6 : Les structures artisanales hypothétiques de Horand I et du 14 rue des Tuileries
(dessins d’après Bellon, Perrin 1992 et Maza 2009).
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Fig. 7 : Répartition des découvertes de céramique d'importation sur les sites hallstattiens de Lyon-Vaise.
leur surface de nombreuses chutes, des ébauches ou
des outils se rapportant à différents types d’artisanat.
Une « surface » de travail au Métro Gorge de Loup
rassemblait un grand nombre de chevilles osseuses de
cornes débitées. Les sols empierrés identifiés sur le site
de Berthet/Cottin sont liés à la présence de deux
fosses-ateliers dans un secteur qui évoque une zone
artisanale. Un empierrement sur le site de Horand II,
interprété comme un sol d’habitat, concentre l’essentiel du mobilier en alliage cuivreux dont une majorité
se rapporte au travail de ce métal. Enfin sur le site du
16-28 rue des Tuileries (Tuileries I) un sol conservé sur
33 m2 rassemble un abondant mobilier domestique lié
à une importante concentration de déchets artisanaux, qui permettent de discerner, sur cette zone, la
mise en forme d’objets en alliage cuivreux, la finition
d’objets en fer et le débitage de cornes autour de deux
postes de travail.
Ces différents aménagements, associés à une
quantité abondante de mobilier, permettent de disposer aujourd’hui d’un ensemble important contribuant
à une meilleure compréhension de l’agglomération
hallstattienne et laténienne de Lyon. Néanmoins, les
données accumulées restent lacunaires et tributaires
d’opérations préventives dont l’emplacement et la
cote de fond de fouille sont aléatoires.
2.2. Le mobilier d’importation
Les nombreuses et fréquentes découvertes de
mobilier d’importation, principalement de céramiques d’origine massaliète (ou d’influence massaliète),
grecque et de manière plus anecdotique étrusque, sont
la première caractéristique de l’occupation du Ha D2-3
et de LT A1 de Lyon (Fig. 7). Il faut également signaler quelques fragments9 de vase en verre (des balsamaires) d’origine rhodienne. Ce matériel a permis
d’identifier un site-relais d’importance, participant au
commerce, notamment du vin et d’autres produits
luxueux, entre le littoral méditerranéen occidental et
les sites celtiques septentrionaux. Les différents recensements effectués par C. Bellon (Perrin, Bellon 1997 ;
Bellon 2003 c) ont décompté 3800 tessons de céramique d’importation à Lyon, parmi lesquels la triade
amphore, olpé/cruche et coupe, liée au transport, au
service et à la consommation du vin, est bien représentée (Fig. 8). Plus de 3000 fragments d’amphores
massaliètes permettaient la restitution d’un minimum
de 70 individus. En revanche, les amphores étrusques
ne sont représentées que par une vingtaine de tessons
(moins d’une dizaine de conteneurs), sans doute en
raison de leur chronologie plus haute. Associés aux
9. Un fragment au Métro Gorge de Loup, un sur le site de Horand IV
et un sur le site du 16-28 rue des Tuileries.
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Fig. 8 : Exemples de céramiques d'importation découvertes à Lyon-Vaise, sites des Tuileries I et II (dessins J. Gasc).
amphores massaliètes, de nombreux tessons à pâte
claire appartiennent à des cruches et des olpés (plus
rarement des coupes) produites à Massalia ou dans
ses établissements bas-rhodaniens. La céramique grise
monochrome, de tradition grecque orientale, fabriquée sur le littoral méditerranéen occidental
(Provence, Roussillon, Languedoc, Marseille) est
quant à elle représentée dans des proportions
moindres. Enfin, quelques tessons de céramique
pseudo-ionienne ou attique complètent le panel des
importations de céramique présentes à Lyon.
Depuis ces dernières estimations, quelques fouilles
préventives et plusieurs diagnostics (n’ayant pas
toujours été suivis d’une opération archéologique)
autorisent aujourd’hui une réévaluation à la hausse de
ces chiffres. En 2007, les sites du 14 et du 16-28 rue des
Tuileries livraient dix nouveaux fragments10, portant à
quarante-huit le nombre de tessons mis au jour à
10. Neuf fragments de petite taille, dont une anse et un bord, proviennent du 14 rue des Tuileries et appartiennent à une ou deux coupes
attiques à vernis noir. Un seul tesson à vernis noir, de petite taille, a
été identifié sur le site du 16-28 rue des Tuileries.
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Lyon. Appartenant à des services à boire, cette
céramique atteste la présence de coupes, de skyphoï et
de cratères importés entre la fin du VIe siècle et la fin
du Ve siècle av. J.-C.11 (Burnouf et al. 1989 ; Bellon,
Perrin 1992 ; Perrin, Bellon 1997). Aujourd’hui, ce
sont près de 29 700 tessons de céramique indigène et
5000 tessons de céramiques importées qui proviennent
des différents sites lyonnais datés de la fin du premier
âge du Fer et du début du second. De même, et à titre
d’exemple, on peut aujourd’hui estimer à plus de
370012 la quantité de fragments d’amphores massaliètes (types 1, 2, 3 et 4 de Py) pour près d’une centaine
de conteneurs. Les quantités avancées ici restent
toutefois sous-estimées puisque pour certaines opérations archéologiques nous ne disposons malheureusement pas de données chiffrées. Ces céramiques attestent un commerce du vin à Lyon-Vaise, mais également de sa consommation, que l’on relie habituellement à une pratique aristocratique. A Lyon, la répartition des découvertes, dans des secteurs aux
vocations artisanales, domestiques ou agro-pastorales
(au premier abord modestes), ne semble cependant
pas réserver cette consommation à une caste privilégiée. Quelques fragments de mortiers massaliètes (5
exemplaires) pourraient démontrer l’évolution des
modes alimentaires d’une partie de la population,
avec l’utilisation de vases destinés à des préparations
culinaires et des assaisonnements de tradition
méditerranéenne. Cette vaisselle pourrait également
constituer un indice de la présence d’une population
plus spécifique, d’origine méridionale, implantée à
Lyon-Vaise, qui reproduirait le mode de consommation de sa région d’origine.
2.3. L’agglomération urbaine de Lyon-Vaise,
centre artisanal
L’importance des activités artisanales constitue la
deuxième caractéristique de l’occupation des VIe et
Ve siècles dans la plaine de Vaise. Elles sont essentiellement révélées par les déchets qu’elles ont rejetés,
parfois en quantités significatives. Elles apparaissent
également par l’intermédiaire de quelques outils et
11. L’exemplaire le plus ancien est un skyphos à bande peinte qui semble
dater des années 540-530 av. J.-C., provenant de Horand I. À Gorge
de Loup, une coupe à figures rouges est datée de 430-425. Une coupe
« de Castulo » est datée de la fin du Ve s. av. J.-C. rue du Docteur
Horand (Perrin, Bellon 1997, Bellon, Perrin 2007).
12. Les chiffres qui précèdent ont été obtenus sur la base de ceux fournis
par C. Bellon et F. Perrin, lors de leur communication au colloque
de Châtillon-sur-Seine (Vix et les éphémères principautés celtiques,
Perrin, Bellon 1997), en adjoignant le matériel mis au jour depuis
cette date. Le chiffre de 3000 tessons d’amphores massaliètes avait
été obtenu par les découvertes effectuées sur 12 sites ayant révélé la
présence de céramiques d’importation. Aujourd’hui, ce ne sont pas
moins de 11 sites supplémentaires qui ont fourni ce type de mobilier,
surtout représenté par des fragments d’amphores.
35E SUPPL. À LA RACF, 2009, AFEAF 32 LES GAULOIS SONT DANS LA VILLE
instruments (pince, ciselet, poinçons, couteaux, hache,
fusaïoles, pesons etc.), liés à des sols de travail ou des
fosses-ateliers. Quatre types d’artisanats sont représentés dans cette phase d’occupation : les métallurgies
du fer et des alliages cuivreux, le travail de la corne et
du textile.
2.3.1. La métallurgie du fer
Dix sites ont révélé des traces liées au travail du fer
(principalement des scories13). Pour la moitié d’entre
eux, la présence de quelques scories n’est pas suffisante pour attester un travail de ce métal (17-21 rue
Gorge de Loup ou Métro Gorge de Loup). En revanche, pour cinq sites, les quantités et les types de
déchets mis au jour peuvent indiquer autant de lieux
d’un artisanat du fer : le 65 rue du Souvenir, le 89-91
rue Marietton, les quatre opérations du 9 rue du
Docteur Horand (Horand I-IV)14, le 24-34 rue Sergent
Michel Berthet/Cottin prolongée et le 16-28 rue des
Tuileries (Fig. 9). Seul ce dernier site a permis l’identification d’un foyer de forge bien conservé, associé à
des structures annexes (bâtiment de couverture,
charbonnières). Les aménagements d’une telle installation restent absents ou trop mal conservés pour être
interprétés de manière certaine sur les autres opérations archéologiques. Cependant, quelques grandes
fosses regorgeant de déchets peuvent se rapprocher de
fosses-ateliers abritant une activité de forge. Elles
rappellent les fosses de la forge de Sévaz, en Suisse
(Mauvilly et al. 1998), ou certaines structures présentes à Bragny-sur-Saône et à Bourges (Pescher 2007,
Milcent 2007). Au 89-91 rue Marietton des sondages
d’évaluation ont permis la découverte de cinq fosses et
d’une couche anthropisée contenant de nombreuses
scories et des fragments de parois vitrifiées (Frascone
et al. 2001 a). L’une d’elles15, circulaire (2 m de diamètre) et d’une profondeur de 0,50 m, a des parois verticales. Sa morphologie et son remplissage qui contient
l’essentiel des déchets métallurgiques (scories et parois
vitrifiées) pourraient permettre d’identifier une structure de forge. Les fouilles de Horand I-IV rassemblent
293 scories représentant quelques kilogrammes (une
paroi vitrifiée à Horand I). Sur le site de Horand I, les
scories se répartissent principalement dans les structures appartenant à la zone sud de la fouille (Bellon,
Perrin 1992), dans l’environnement d’un foyer placé
au bord d’une fosse16 (Fig. 6) dont l’aspect n’est pas
sans rappeler les aménagements de la forge de SévazTudinges (Suisse) (Mauvilly et al. 1998). Rue du
13. L’importance de ce mobilier n’a pas toujours été saisie et l’on dispose
rarement de quantifications précises et d’inventaires détaillés.
14. Ces quatre opérations effectuées sur la même parcelle (8000 m2), mais
en tranches différentes, seront considérées comme un unique site.
15. Il s’agit de la fosse F19 présente dans le sondage 8 (Frascone et al.
2001 a, p. 11-12, fig. 27).
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Lyon-Vaise à la fin du VIe s. et au Ve s. av. J.-C.
Fig. 9 : Localisation des sites du premier âge du Fer à Lyon-Vaise, et répartition des traces liées à l'activité métallurgique du fer
(fond de carte : ALyAS, Service archéologique de la Ville de Lyon et St. Carrara).
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Fig. 10 : Plan de la forge du 16-28 rue des Tuileries
(plan SAVL, DAO : P. Dessaint).
Souvenir, cinq fosses ont fourni un important lot de
scories et d’argile vitrifiée (Plassot, Thévenin 1992).
Le réexamen et le tri des déchets de forge, en cours,
permettent d’ores et déjà de préciser que le poids total
de 49 kg se répartit entre 34 kg de scories et de culots,
16. Cette fosse (F300), presque circulaire, de 1,50 m par 1,20 m pour une
profondeur de 0,70 m, est placée devant un foyer (F202) de 0,80 m
par 0,80 m installé dans une petite cuvette. Cette fosse est certes plus
petite que celles de Sévaz (Mauvilly et al. 1998). Néanmoins, sa taille
paraît suffisante pour qu’un homme y tienne debout à fin de travail
sur le foyer et d’éventuels aménagements annexes.
17. La fosse F63 possède une forme pseudo-circulaire, de 2 m par 2,20 m
pour une profondeur 0,30 m, ses parois sont verticales.
18. Il faut signaler que cette fosse contenait la moitié des parois d’argile
vitrifiée découvertes sur le site soit 7,5 kg. Ces fragments ne sont pas
roulés, et possèdent des cassures fraîches. Certains atteignent des
tailles proches de 20 cm.
et 15 kg de parois de foyer en argile vitrifiée, associés
à de nombreuses battitures lamellaires. L’une des
fosses, de grande dimension et de forme régulière17
contient la majeure partie des scories (soit près de
13 kg) et des parois vitrifiées (soit 7,5 kg). Parmi ce
mobilier, on peut identifier cinq fragments de paroi
vitrifiée possédant la trace d’un trou de ventilation
circulaire d’environ 2 cm de diamètre. L’un d’eux
comporte également la trace d’arrachement d’un
culot de fond de forge ; sa forme en arc de cercle
permet de reconnaître l’existence d’un foyer circulaire,
installé probablement dans une cuvette, et dont le
diamètre intérieur devait mesurer entre 20 et 30 cm.
La quantité de déchets de forge, et notamment celle de
parois en argile vitrifiée18, associée à la morphologie
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Lyon-Vaise à la fin du VIe s. et au Ve s. av. J.-C.
de cette grande fosse, peut permettre d’y situer le
centre de l’activité métallurgique (Fig. 4). Enfin, la
fouille de Berthet/Cottin associe un important lot de
déchets et des structures en creux, identifiées comme
« fosses-ateliers » pour une ou peut-être deux d’entreelles19. Ces fosses, à parois verticales et fond plat,
trouvent des comparaisons sur le site de Bragny-surSaône où des fosses quadrangulaires abritent des
déchets similaires (Feugère, Guillot 1986). Des structures comparables sont également connues à Bourges
sur les sites de « St-Martin des Champs » (Milcent
2004 et 2007) et de « Port Sec sud » (Pescher 2007,
Augier et al. ce volume), où des fosses quadrangulaires sont assimilées à des fonds d’atelier semi-enterrés.
L’exemple de la forge de Sévaz-Tudinges (Suisse)
paraît intéressant pour la caractérisation des fosses de
Berthet/Cottin. En effet, ce site suisse a révélé, entre
autres, deux fosses de 1,80 à 1,90 m de diamètre pour
0,90 à 1 m de profondeur, sur les bords desquelles on
trouve de petits foyers de 0,50 cm à 1 m de diamètre.
Les artisans se tenaient donc debout dans le fond de
ces grandes fosses de travail afin d’utiliser les foyers
construits sur leurs rebords (Mauvilly et al. 1998).
Même si les formes et les dimensions diffèrent entre
les deux sites, l’exemple de Sévaz montre que les foyers
peuvent être placés en bordure de fosse lorsque l’on
est en présence de ce type de creusement. Les déchets
liés à la métallurgie du fer de Berthet/Cottin rassemblent 15 kg de scories et de culots, 7 kg de parois en
argile vitrifiée et 270 g de battitures. Jusqu’aux découvertes de 2007, il s’agissait du cas le plus concret attestant le travail du fer à Lyon, avec le site de la rue du
Souvenir, même si aucun aménagement de combustion, en relation avec cette activité, n’avait pu être
clairement identifié.
Les structures de forge et le sol de travail mis au
jour sur le chantier des Tuileries, dans un contexte de
la fin du premier âge du Fer et du début du second,
fournissent les vestiges qui manquaient à Lyon pour
identifier avec certitude une activité métallurgique du
fer (Fig. 10). Les vestiges mettent en évidence une
organisation entre une zone où au moins deux foyers20
semblent directement liés à la forge, et un secteur
dédié à la finition, où deux postes de travail correspondent, entre autres, à des lieux de mise en forme des
objets en alliages cuivreux et de traitement de surface
19. Il s’agit des fosses F25 et F15 de formes quadrangulaire et pseudocirculaire. La fosse F 25 de 2,60 m par 2,40 m possède une profondeur de 0,66 m. La fosses F15 de 2,06 m par 2,40 m conserve une
profondeur de 0,54 m.
20. Un petit foyer circulaire (0,45 m de diamètre) en cuvette (F 7081)
conserve une partie de ses parois en argile vitrifiée et scoriacée. Il
contenait encore de nombreuses scories parmi son comblement et
une grande quantité de battitures était présente dans la structure et
autour de celle-ci. Un deuxième foyer, rectangulaire (F7028), de plus
grande dimension (1,20 m par 0,80 m) est plus érodé. Il aurait pu
être destiné au forgeage de pièces plus importantes ne pouvant être
travaillées dans le petit foyer circulaire.
221
des objets en fer. Le site offre les masses de déchets les
plus importantes mises au jour pour la plaine de
Vaise. La multitude des types de déchets permet de
caractériser les opérations se déroulant sur place.
90 kg de scories et de culots de fond de forge proviennent d’opérations de forgeage et/ou d’épuration. 21 kg
de parois en argile vitrifiée et scoriacée sont issues du
démontage ou de la réfection des foyers de forge, l’un
des fragments présente un orifice circulaire de 2 cm de
diamètre appartenant à un « trou à vent » (Orengo
2003) attestant la présence d’un système de ventilation
des foyers. Près de deux kilogrammes de battitures
rassemblent les trois types communs attachés à ces
déchets : lamellaires, sphériques ou granulaires. Elles
permettent de confirmer un travail de forgeage, mais
sans doute également un travail d’épuration, ou du
moins le travail d’un fer impur nécessitant une telle
opération. Une série de masses métalliques informes
(ou scories ferreuses) (3 kg) peut se rapporter au
travail d’épuration « d’éponges », de lingots ou au
travail d’élaboration utilisant un métal riche en
impuretés (nécessitant un affinage au préalable).
Enfin, une vingtaine de chutes de découpe de barres
renvoient au forgeage et à la fabrication d’objets
(Fig. 11). Il faut toutefois souligner l’absence de
déchets caractéristiques d’une forge de réduction du
minerai de fer sur l’ensemble des sites lyonnais du Ha
D3-LT A1. Le fer travaillé à Lyon semble donc avoir
été produit ailleurs et arrive sur le site sous une forme
qu’il reste à déterminer : fer brut ou lingots. Si
certains déchets (les masses de fer informes et certaines battitures) semblent plaider pour le travail de fer
brut, une étude paléométallurgique plus poussée de
ceux-ci devrait permettre de confirmer ou d’infirmer
cette hypothèse. Plusieurs fragments de tiges aux
sections carrées, rectangulaires ou rubanées, associés
à des fragments de fibules ratées ou non terminées,
attestent une production de fibules à timbale sur le
pied de type Mansfeld F4 A2 (Mansfeld 1973) dans la
forge de la rue des Tuileries.
La présence avérée d’une forge, liée à des structures
similaires déjà pressenties sur quelques sites de Vaise
(notamment à Berthet/Cottin, rue du Souvenir et à
Horand I), confirme l’importance de l’activité métallurgique du fer sur l’agglomération du Ve s. de Lyon.
On dispose d’une masse (sous-estimée) de 191 kg de
déchets21, puisqu’une partie des informations concernant ce mobilier n’est pas disponible. Cette quantité
peut paraître faible proportionnellement aux 140 kg
21. Ces 191 kg de déchets se répartissent entre : 142 kg de scories, 43 kg
de paroi vitrifiée et scoriacée appartenant à des foyers de forge, 3 kg
de chutes de découpe et de scories ferreuses provenant du site des
Tuileries, et près de 3 kg de battitures (Tuileries, Berthet/Cottin, rue
du Souvenir). À cette masse il faut ajouter les 293 scories et culots
des opérations archéologique de Horand I-IV et l’important lot de
déchets provenant du 89-91 rue Marietton, pour lesquels on ne
dispose pas de données pondérales.
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Fig. 11 : Chutes de barre en fer, chutes de découpe et ébauches
ou ratés de fabrication d'objet en fer sur les sites des Tuileries I et II
(dessin : St. Carrara).
(200 kg estimés) de la forge de Sévaz (Suisse), qui
s’inscrit dans un habitat modeste et isolé, et anecdotique face aux 400 kg de scories de Bragny-sur-Saône,
recueillis sur 400 m2, qui permettent de restituer, sur
les 3 ha du site, une quantité de 10 tonnes de scories
(Collet, Flouest 1997). Mais, sur le site des Tuileries,
les scories présentes sur un sol de 33 m2, qui pouvait
en compter environ 270, permettent de restituer une
masse hypothétique de 700 kg rejetée sur cette zone.
Des culots de petite taille (70 à 90 g) et d’autres plus
importants (de 300 à 400 g) pourraient suggérer la
production d’objets de petite et moyenne taille. La
présence de nombreux déchets liés à cette activité,
répartis sur différents points de la plaine, distants de
quelques centaines de mètre à près d’un kilomètre,
paraît démontrer la coexistence d’au moins cinq
ateliers de forge pendant une période couvrant le Ha
D3 et LT A1 (520-425 av. J.-C.). Les quantités de
parois vitrifiées et la présence d’éléments plus spécifiques (trous de ventilation) témoignent de l’existence,
sur chacun des sites, de structures pérennes ayant fait
22. Sur les 30 sites ayant fourni les traces d’une présence humaine au
VIe-Ve siècle av. J.-C., seulement 23 ont réellement donné les traces
d’une occupation et la présence de vestiges. Si l’on considère que les
quatre opérations de la rue du Docteur Horand ne forment qu’un
seul site, sur 20 sites effectifs 5 sont concernés par la métallurgie du
fer, soit une moyenne d’un atelier de forge pour quatre sites.
l’objet de multiples réfections. Pour l’heure, cinq
ateliers peuvent être identifiés à Lyon-Vaise sur une
surface fouillée restant modeste22. De fait, on est en
droit de s’interroger sur la destination des productions
issues de ces forges. Répondent-elles aux seuls besoins
de l’agglomération ou sont-elles en partie destinées à
un commerce à plus grande échelle, tourné vers l’extérieur ? Si l’on part du postulat que ces différentes
unités de production ont fonctionné en même temps,
la masse de déchets associée à des structures pérennes,
où l’on peut identifier la fabrication de fibule qui
représentent un haut niveau de technicité, semble
dépasser une activité occasionnelle ou peu spécialisée.
Ces ateliers spécialisés pourraient répondre à des
besoins dépassant ceux de l’agglomération et jouer un
rôle majeur dans son économie.
2.3.2. La métallurgie des alliages cuivreux
Les traces d’une métallurgie des alliages cuivreux
apparaissent, quant à elles, sur cinq sites : au 9 rue du
Docteur Horand (Horand I-IV), au 24-34 rue Sergent
Michel Berthet/Cottin prolongée, sur un diagnostic au
26 avenue Joannès Masset, au 16-28 rue des Tuileries
et au 14 de la rue du même nom (Fig. 12). Une
nouvelle fois, ce sont avant tout les résidus et quelques
outils qui attestent une production (scories de bronze,
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Fig. 12 : Localisation des sites du premier âge du Fer à Lyon-Vaise,
et répartition des traces d'activité liées à la métallurgie des alliages cuivreux
(fond de carte : ALyAS, Service archéologique de la Ville de Lyon et St. Carrara).
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Fig. 13 : Chutes, ébauches, fabricats, éléments destinés à la refonte et outils liés au travail des alliages cuivreux
(dessins : St. Carrara).
creusets, fragments de moule en argile, chutes de
découpe, ébauches, coulées de bronze), même si
quelques fosses et des sols empierrés peuvent être
assimilés à des fonds d’atelier et des aires de travail.
Un abondant mobilier découpé, ébauché,
ployé/roulé pour la refonte, associé à des scories et des
coulées d’alliage cuivreux, quelques fragments de
moules en argile (Berthet/Cottin, Horand I) et des
creusets (26 avenue Joannès Masset, Berthet/Cottin,
14 rue des Tuileries), sont présents sur les cinq sites
(Fig. 13). Ils confirment le travail des alliages cuivreux
à Lyon, qui semble principalement localisé entre les
sites de Horand I-IV, de Berthet/Cottin et des
Tuileries. Si l’emplacement de la zone de mise en
forme et de finition des objets ne fait pas de doute sur
le chantier archéologique des 16-28 rue des Tuileries,
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Lyon-Vaise à la fin du VIe s. et au Ve s. av. J.-C.
Fig. 14 : Localisation des sites du premier âge du Fer à Lyon-Vaise et des traces d'un travail artisanal de la corne
(fond de carte : ALyAS, Service archéologique de la Ville de Lyon et S. Carrara).
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le secteur de fonte et de coulée de l’alliage cuivreux ne
semble pas avoir été découvert, celui-ci ayant sans
doute été détruit par le passage d’un paléochenal
entre le IVe et le Xe siècle apr. J.-C. Le site de
Berthet/Cottin semble abriter le même type de
contexte avec la présence probable de fosses-ateliers,
mais là encore aucune structure destinée à la fonte de
l’alliage n’a été repérée, même si la présence de déchets
paraît indiquer sa présence toute proche (Ramponi
et al. 2004, Le Mer, Chomer 2007 : 728-731).
Plusieurs tiges en alliage cuivreux sont probablement des ébauches abandonnées en cours de réalisation, ratées ou éliminées lors de la mise en forme de
l’objet (Fig. 13, n° 35, n° 68-69, n°78). Ces éléments
portent des traces de découpe, de martelage et de
torsion. Ces longues tiges semblent pouvoir être
reliées à la mise en forme de fibules à simple timbale
sur le pied, de type Mansfeld F4 A2 (Mansfeld 1973).
Une tige à globules (à arêtes vives, une face arrière
lisse, des bords avec légères barbelures et une trace de
découpe à l’extrémité) semble être issue d’une coulée
dans un moule en pierre. Cet objet peut être rapproché d’une préforme coulée (fabricat), avant sa finition
par martelage, pour la fabrication de fibules à double
timbale de type Mansfeld dP4. Les deux globules
constituent une réserve de matière pour la mise en
forme des timbales sans doute par un système
d’estampe et de contre-estampe. Cet objet apporte un
regard nouveau sur les techniques de mise en forme
des fibules à double timbale (Fig. 13, n°119). Une
dizaine d’objets identiques (en dimension et en forme)
ont été découverts sur le site de Port Sec sud, à
Bourges, en 2005-2006. Une interprétation similaire
leur a été donnée. Le même gisement a livré une
centaine de préformes coulées, pour la fabrication de
fibules à timbale simple, en contexte LT A1. Ces
exemples confirment l’identification de l’exemplaire
lyonnais et éclairent un aspect du processus de fabrication des fibules de tradition ou de schéma hallstattien.
Même si les résidus du travail des alliages à base de
cuivre sont assez bien représentés à Lyon, leur masse
reste faible (gouttes, jets de coulée, chutes) : 57,9 g de
bronze sur le site des